8ème page des Souliers...
« - Mon plus jeune fils veillera sur son envol » dit encore l’aigle disparaissant déjà au loin.
De nouveau le vieil homme s’endormit dans son rêve.
Six jours s’écoulèrent, durant lesquels le faiseur d’ailes prit soin de la jeune endormie. Il se reposa beaucoup lui-même, car son corps fatigué devenait chaque jour plus lourd et difficile à conduire. Ses mains tremblaient, mais il les savait encore solides. Elles allaient encore devoir accomplir les deux plus belles créations de sa longue vie.
Au soir du sixième jour il s’endormit dans l’attente des retrouvailles avec le serpent. Il était à la fois confiant et tendu à l’idée de prendre une vie, même offerte, lui qui avait toujours fui la violence.
Tout se passa comme le serpent l’avait annoncé. Au réveil, le vieil homme commença à préparer la peau pour les souliers de la belle endormie et l’éventail qui accompagnerait son dernier voyage. Il ne prit pas le moindre instant de repos, ses mains furent fidèles et justes. Il s’endormit le soir venu comme une bête après une longue course.
Comme la veille, il répugnait à ôter la vie de l’aigle, mais savait leurs destins scellés.
Au soir du huitième jour, le vieil homme avait terminé les souliers de la jeune fille et l’éventail qui libèrerait son âme.
Il sentait ses forces disparaître et versa de longues larmes chaudes. C’est alors que la jeune femme s’éveilla et vint bercer le faiseur d’ailes enserrant son dos maigre de ses bras frais et fermes. Ils n’échangèrent pas un mot. Blottis l’un contre l’autre ils souriaient doucement. Sentant le sommeil venir, le vieillard se redressa et fit asseoir la belle esclave sur le bord de la couche.
Il s’accroupit à ses pieds, lui montra l’éventail de peau et de plumes qui était resté sur l’établi :
« -Tu sais ce que tu devras faire avec ça pour moi, » demanda-t-il dans un murmure ?
« -Oui mon père répondit-elle. »
Le cœur du vieil homme faillit se rompre à ces dernières paroles, mais il ne rendit qu’un sourire rempli de gratitude à son enfant.
« -Tes souliers sont enfin prêts ma fille, pardonne-moi d’avoir tant tardé. »
Il prit une profonde inspiration et continua :
«- Mon enfant aimée, bonheur de mes dernières années tu as rempli mon cœur et mon âme d’un espoir nouveau, il est temps aujourd’hui que tu traces ta propre route. Par ces souliers je te libère de toute attache et t’invite à parcourir le monde sous le nom de Vâyu »
A l’évocation du nom de l’enfant il exhala son dernier souffle et partit pour son dernier voyage entre les bras protecteurs de la jeune femme.
Elle passa la nuit à veiller la dépouille du faiseur d’ailes. Elle avait ouvert toutes les portes et les fenêtres pour que les esprits puissent venir rendre leur dernière visite au jeune mort. Très tôt, le lendemain matin elle avait, selon l’ancienne coutume, déchaussé le mort, pour qu’il puisse enfin arrêter sa course et prendre du repos. Ensuite, elle avait dressé le bûché au milieu de la cour, puis
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